Entretien du président en exercice de l'OSCE, ministre des Affaires étrangères, européennes et du Commerce de la République de Malte, Ian Borg, avec l'APA
- Lors de votre visite dans la région, vous avez tenu des réunions à Erevan et à Bakou. Monsieur le Ministre, comment évaluez-vous la situation globale dans la région ?
- La situation politique et sécuritaire sur le terrain est très dynamique, passant d'apparente stable à – parfois – fragile. C'est pourquoi nous continuerons à le suivre de près. Cela dit, et malgré les défis importants qui nous attendent, je suis prudemment optimiste et conscient des opportunités qu’une paix durable offrirait. Des progrès ont été réalisés dans la délimitation de la frontière, ce qui constitue une étape vers un éventuel accord de paix entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan. Cependant, un règlement durable et à long terme continue d’exiger des compromis significatifs et une volonté politique considérable de la part des deux parties, ainsi que la compréhension au sein de la société que des mesures audacieuses et du pragmatisme sont nécessaires. Nous avons besoin d’un dialogue constant sur un pied d’égalité et de pragmatisme pour parvenir à une paix durable.
Il est également clair qu’un règlement durable et viable serait encore renforcé par le soutien et l’engagement actifs et complémentaires de la communauté internationale. À cet égard, grâce à l’ensemble complet d’outils de l’OSCE et à ses décennies d’expérience, nous sommes prêts à aider et à compléter les efforts des Azerbaïdjanais et des Arméniens, dans l’intérêt de la paix, de la sécurité et de la stabilité.
- Lors de la conférence de presse, vous avez noté que l'OSCE est consciente que les parties préfèrent les négociations bilatérales. En effet, c'est une situation rare, je pense, l'OSCE exprime son soutien aux négociations bilatérales qui jouent toujours un rôle de médiateur...
- Mon objectif est simple : je veux soutenir activement l'Arménie et l'Azerbaïdjan dans leurs efforts visant à normaliser leurs relations bilatérales par le biais d'un dialogue global et inclusif, ce qui est la voie qu'ils ont empruntée et qui devrait être accompagnée par les partenaires internationaux dans la mesure du possible.
L'intensification des négociations de paix est remarquable et leur poursuite est essentielle, et l'OSCE est pleinement déterminée à soutenir les efforts bilatéraux et multilatéraux, là où cela est possible et nécessaire, dirigés vers cette fin. La poursuite de la diplomatie et le recours à des moyens pacifiques restent la seule voie viable pour parvenir à une résolution durable qui adhère aux principes et engagements fondamentaux de l’OSCE.
En tant que président actuel, Malte, aux côtés du cadre plus large de l’OSCE, est prête à offrir ses bons offices et ses canaux de communication. Notre plateforme occupe une position unique, motivée par un intérêt évident à cultiver la paix et à favoriser la coopération régionale dans le Caucase du Sud.
- Monsieur Borg, vous avez qualifié l'évolution récente du processus de délimitation entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan de "mesure précieuse". En fait, la communauté internationale a déjà accueilli favorablement le processus, mais d'un autre côté, nous voyons certains groupes en Arménie essayer de saper le processus... Alors, comment la communauté/les organisations internationales peuvent-elles encourager le processus ?
- En tant que représentant d'une organisation importante, l'OSCE, j'ai salué à plusieurs reprises les progrès réalisés dans la délimitation de la frontière. Et j’ai clairement exprimé notre soutien à une poursuite constructive et significative de ce processus. En tant que président en exercice de l’OSCE et ministre des Affaires étrangères de Malte, je crois qu’il n’y a pas d’autre alternative que de poursuivre la voie de la diplomatie.
- Monsieur le Ministre, vous avez déclaré que la paix globale entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan reste la priorité absolue de l'OSCE. Cependant, les dirigeants azerbaïdjanais ont toujours exprimé leur désaccord/inquiétude quant au rôle de l'OSCE, qui n'a pas fonctionné au cours des 30 dernières années...
- Mon objectif lors de cette visite est de regarder vers l'avenir et de souligner qu'il existe un chemin clair à parcourir. Notre engagement reste fort et nous nous engageons à faciliter le dialogue et la compréhension pour progresser vers une paix durable. L’OSCE est prête à s’engager, non seulement pour faire face aux conséquences du conflit pour toutes les femmes, hommes, enfants et personnes âgées touchés, mais aussi pour contribuer à faire progresser et à mettre en œuvre les accords eux-mêmes.
- En guise de question complémentaire, l'opinion générale est que la plus grande organisation de sécurité d'Europe n'est plus aussi efficace qu'elle l'était, que son mécanisme de médiation ne fonctionne pas et que ses membres ne respectent pas leurs engagements au sein de l'organisation. Quelle serait votre réponse à ces affirmations ?
L’OSCE continue d’appliquer son mandat, son expérience et son expertise pour faciliter les mesures de confiance, promouvoir une paix durable et obtenir des résultats en faveur des personnes touchées par le conflit, lorsque cela est possible.
Cependant, permettez-moi d'être clair : une organisation n'est forte que dans la mesure où ses membres lui permettent de l'être. Cela est d’autant plus vrai lorsqu’il s’agit d’une organisation fondée sur le consensus comme l’OSCE. Ce n’est donc pas une question d’efficacité des instruments. Il s’agit d’assumer ses responsabilités, de faire preuve de détermination politique et d’être disposés à se rencontrer à mi-chemin. Notre organisation n’est pas seule à faire face à ces défis. La plupart, sinon la totalité, des institutions multilatérales subissent aujourd’hui des pressions considérables.
Cela dit, le caractère unique de l’OSCE signifie qu’elle est confrontée à son propre ensemble de défis particuliers, notamment celui d’établir une base financière solide. Nous reconnaissons pleinement ces préoccupations et restons déterminés à y répondre avec la diligence et le professionnalisme qu’elles méritent.
- Et la dernière question, il y a eu un manque de consensus concernant le budget unifié de l'OSCE. Y a-t-il une évolution par rapport au consensus ?
Les négociations sur le budget unifié sont toujours en cours. Dans les semaines à venir, nous continuerons de souligner la nécessité pour les 57 États participants de faire preuve de la volonté politique et de la flexibilité nécessaires pour parvenir à un consensus sur cette décision institutionnelle clé.
Il appartient à chacun d’entre nous de poser la première pierre de l’instauration de la confiance et de mettre résolument cette organisation sur la voie d’un avenir plus durable, plus efficace et plus résilient.